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Espaces de travail : qu’attendent les managers ? (Nexity/Ipsos)

Vecteur d’attractivité et de rétention des talents, outil de productivité et vitrine d’une culture d’entreprise, l’espace de travail est constamment remis en question, en France comme à l’étranger. Comment répondre aux attentes des collaborateurs tout en conciliant des impératifs de concentration et d’interaction ? Dans le cadre d’une enquête menée en partenariat avec Ipsos, Nexity a interrogé 1 600 managers et chefs de projets français, allemands, américains et chinois pour répondre à la question.

Travaillant dans le secteur privé, chaque manager interrogé encadre une équipe et consacre au moins 25 % de sa vie professionnelle à du travail de bureau. Or, bien qu’ils partagent un cadre de travail commun, la vision que chacun porte sur son rôle diffère d’un pays à l’autre. En France, 26 % des managers estiment que l’une de leurs trois missions les plus importantes est d’apporter une expertise technique, contre 16 % en moyenne dans les autres pays. Ceux-ci relèguent en revanche au second plan les tâches de supervision et de communication, que leurs collègues des autres pays revendiquent pourtant comme leur principale raison d’être. « Cette hiérarchisation des missions marque un point de vue typiquement français vis-à-vis des notions d’autonomie et d’autorité, avance l’étude. À certains égards, les Français apparaissent comme des « superviseurs contraints », préférant se définir comme des accompagnateurs plutôt que comme des instances de contrôle, et surtout, ayant pour conviction que leur valeur ajoutée réside d’abord dans l’expertise technique. » Autre constat, là où Chinois et Américains travaillent davantage en interaction, il existe en France une crainte de la réunionite associée à la conviction qu’interagir efficacement, c’est interagir en comité restreint, une posture qui mène les managers à limiter les interactions en interne, en particulier lorsqu’elles impliquent trois personnes. Par contre, alors que les Américains se démarquent par un recours intensif aux e-mails, les Chinois semblent les éviter.

Des sens inverses

Des disparités s’observent aussi dans le sens que chacun accole au travail. En France, le manager vit un fort niveau d’engagement, alors que 37 % des cadres estiment primordial d’avoir un métier qui les passionne. Cet aspect ressort d’ailleurs devant la rémunération (32 %) et l’équilibre vie privée/vie personnelle (34 %), pourtant les deux principales préoccupations dans le reste du monde. Aussi, l’autonomie est survalorisée dans l’Hexagone, alors que plus d’un cadre sur trois émet le souhait d’être autonome, contre une moyenne de 17 % pour les autres pays. En revanche, alors que les Américains appréhendent leur carrière professionnelle sous l’angle du rendement, les Allemands survalorisent la qualité de leur cadre de travail et de leur bonne entente avec les collègues. « Une originalité du management à la française se dessine, avance Nexity. Managers et chefs de projets aspirent à disposer de marges de manœuvre vis-à-vis de leur hiérarchie, tout comme ils acceptent et encouragent l’autonomie de leurs équipes, en rechignant à s’immiscer trop fortement dans l’organisation du travail. »

Le télétravail plébiscité dans l’Hexagone

Ces visions et valeurs divergentes ne peuvent que se répercuter sur l’organisation du travail. Par exemple, bien qu’ils aspirent à l’être moins, les cadres français et allemands sont encore plus sédentaires, selon Nexity : « En France comme en Allemagne, la pratique du télétravail est moins répandue : seulement 40 % des Français font du télétravail, 15 % seulement plus de cinq fois par mois (contre 25 % aux États-Unis, 35 % en Chine). » De surcroît, l’équipement n’est pas véritablement au niveau pour le travail en mobilité, puisque seulement 63 % des Français disposent d’un ordinateur portable (contre 78 % aux États-Unis) et seulement 28 % ont accès à distance au réseau de leur entreprise (contre 41 % aux États-Unis). Pourtant, les managers français sont favorables au télétravail (72 %) et en ont une meilleure perception que les Allemands (65 %), puisque celui-ci est vu comme une réponse à leur quête d’autonomie. « La rigidité des entreprises en lien avec le télétravail figure parmi les principaux irritants des managers français dans leur poste actuel, avance Nexity. 37 % d’entre eux sont insatisfaits des possibilités qui leur sont offertes en la matière, une frustration d’autant plus forte qu’elle entre en collision avec l’aspiration à l’autonomie. »

Un bureau fermé et bien localisé, SVP ?

Face à ce désir d’autonomie et de travail à distance, la question de la localisation des espaces de travail reste évidemment au cœur des préoccupations des cadres de l’Hexagone, selon Nexity : « Les Français, davantage que leurs homologues des autres pays, apparaissent très focalisés sur la question du temps de trajet pour se rendre à leur travail. Un manager français sur quatre se déclare insatisfait de la proximité de son lieu de travail par rapport à son domicile. » Ceux-ci sont ainsi les seuls à privilégier la proximité plutôt que la fonctionnalité, à l’instar des Américains, des Allemands et des Chinois, comme critère décisif pour le choix des locaux de leur entreprise.

Les attentes des cadres face à leurs lieux de travail sont aussi différentes d’un pays à l’autre. Pour les Français et les Américains, les espaces de travail doivent être des espaces fonctionnels permettant d’accomplir une variété de tâche, en favorisant tant l’isolement que les interactions. « En France, les attentes conjuguent concentration et interaction à un niveau quasi-équivalent, constituant une forte injonction paradoxale. » Les Allemands et les Chinois, en revanche, souhaitent avant tout évoluer dans un cadre agréable et esthétique répondant à leurs besoins personnels. Aussi, bien qu’il ne soit majoritaire qu’aux États-Unis, le bureau individuel est plébiscité par tous les managers interrogés parce qu’il répond à la fois à leurs besoins de concentration et de bien-être. Inversement, l’open space et le flex office suscitent des réticences. « Décriés en termes de bien-être, ils n’emportent pas la pleine conviction non plus sur la dimension fonctionnalité, conclue Nexity. Pourtant, bien pensés et bien accompagnés, ils participent dans certains cas à répondre aux attentes contradictoires – isolement, interactions, autonomie, centralité urbaine – exprimées par les collaborateurs, en ouvrant la voie à des espaces différenciés pour plus de flexibilité et de synergies. »