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Campus Urban Valley / Georges Rocchietta, Patrick Ollier & Samuel Poutoux

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Photo à la Une : © Zoé Guenne

Première opération issue de l’appel à projets Inventons la Métropole du Grand Paris à voir le jour, le Campus Urban Valley a été inauguré récemment par le groupe Atland sur l’ancienne friche industrielle des Tartres, située sur les communes de Pierrefitte et de Stains, et accueille aujourd’hui une programmation mixte alliant des locaux d’activités, des espaces tertiaires, des commerces, une résidence étudiante, un restaurant ainsi qu’un parking silo, le tout sur 24 000 m2. Regards croisés avec Georges Rocchietta, président-directeur général d’Atland, Patrick Ollier, président de la Métropole du Grand Paris, et Samuel Poutoux, architecte associé au sein du cabinet Atelier WOA. 

L’histoire

Patrick Ollier  : La Métropole du Grand Paris a été créée de manière opérationnelle depuis 2016, là où toutes les villes de France existent évidemment depuis plusieurs centaines d’années. Cette nouvelle collectivité devait donc démontrer dès le départ sa capacité à organiser son développement et à s’impliquer dans des dossiers transversaux concernant les 131 communes qui la composent et en faveur des 7,2 millions d’habitants qu’elle représente. Quelques semaines après avoir été élu président, j’ai donc eu l’idée de lancer le concours Inventons la Métropole du Grand Paris avec l’ambition de démontrer notre capacité et notre volonté à engager des actions urbanistiques significatives, innovantes, crédibles et lisibles auprès des aménageurs, comme une sorte de dynamiseur pour le développement de nos communes. Nous avons su fédérer autour de ce concours les aménageurs, qui s’associent avec des promoteurs, des banquiers et des architectes, et ces groupements sont candidats dès lors qu’un maire propose une parcelle ou un immeuble à soumettre à l’appel à projets. Inventons la Métropole du Grand Paris est à l’heure actuelle le plus grand appel à projets urbains innovants d’Europe.

Georges Rocchietta : Première livraison issue de l’appel à projets Inventons la Métropole du Grand Paris, cette opération portait sur une friche industrielle. L’arrivée de la gare du tramway T11 de Stains-Pierrefitte a beaucoup changé l’attractivité. Concernant la localisation, il est en effet assez rare, en tant qu’aménageur, promoteur et investisseur, de travailler sur l’aménagement d’un site accueillant la création d’une gare. Nous avons répondu au concours avec la conviction forte que la proximité des infrastructures de transports nous permettrait d’attirer des entreprises et de tertiariser le site. Dès le départ, nous avons décidé d’opter pour une programmation mixte alliant bureau, activité, commerce, restauration, logement et parking public. Nous étions également convaincus que la taille du terrain permettait de développer une opération d’une grande qualité architecturale.

Samuel Poutoux : Intéressé par notre expertise autour du matériau bois, Atland a fait appel à nous avec la mission de refaire un morceau de ville et un lieu de vie par la reconversion d’une friche industrielle. Au moment de la candidature, il existait une problématique forte autour des enjeux écologiques et notre capacité à construire de manière plus vertueuse un parc d’activités, généralement vu comme une succession de boîtes de métal. Nous y avons répondu par une proposition différente en matière de système constructif et de programmation immobilière, articulée autour de la mixité d’usages.

Le programme

GR : Assez rapidement, nous sommes entrés en contact avec le Lab Crigen, centre de recherche d’Engie travaillant sur les nouveaux modes d’énergie, pour qui nous avons livré en 2020 un bâtiment clé en main de 9 000 m2 alliant bureaux, espaces de recherche et zones de tests et d’essais. Parallèlement, la Fondation Total cherchait un espace pour L’Industreet, son campus dédié à l’accompagnement des jeunes sans formation sur les métiers de l’industrie. Nous avons conçu avec les équipes de Total un ensemble de 11 000 m2 adapté à l’enseignement académique et technique. La résidence hôtelière initialement prévue a été remplacée par une résidence étudiante de 75 chambres ayant vocation à loger les élèves de L’Industreet et dont la livraison en 2023 viendra conclure l’opération. Le projet est par ailleurs complété par 1 300 m2 de commerces, qui pourraient être loués prochainement par une enseigne alimentaire, un pôle de restauration inter-entreprises ainsi qu’un parking silo de 320 places. L’ensemble de l’opération sera conservé en patrimoine par un des véhicules sous gestion d’Atland.

SP : D’abord, le projet se démarque par le parti pris de réunir les voitures au sein d’un parking silo, ce qui permet de récupérer du sol et s’inscrit en contre-pied de la pratique habituelle dans les parcs d’activités. Ensuite, d’un point de vue programmatique, le projet peut s’adapter à toutes les demandes, mais a été pour autant pensé sur mesure pour les occupants. Pour Engie, nous avons ainsi réalisé une grande halle pour le laboratoire de recherche, avec une structure métal, et une partie bureaux plus classique, avec une structure 100 % bois. Dans la même veine, le campus de L’Industreet de la Fondation Total est composé d’une partie dédiée à l’enseignement théorique alliant salles de classe et circulations, en structure bois, ainsi qu’une partie expérimentation et enseignement pratique, avec de grandes halles en structure mixte et des portiques en métal permettant d’avoir de grandes portées. Mixer deux systèmes constructifs, le poteau-poutre et le mur à ossature bois, s’inscrit par ailleurs en cohérence avec le traitement des façades, en bardage bois prégrisé pour l’ensemble des bâtiments. Et en face de ces deux grands programmes, on retrouve le pôle services intégrant le restaurant inter-entreprise, le parking silo et la résidence étudiante. La mixité est donc présente à toutes les échelles du projet.

PO : Le grand avantage de ce concours est que des promoteurs et des aménageurs se sont intéressés à des programmes auxquels ils n’auraient jamais songé. La Métropole s’emploie d’ailleurs à faire du rééquilibrage territorial, puisque les deux tiers des projets et des investissements que nous réalisons sont situés au nord et à l’est de Paris. Ce site de Stains-Pierrefitte était complètement délaissé, dans une zone avec une insécurité évidente, et son inclusion dans le concours a permis d’impulser une dynamique qui n’existait pas. Sans ce projet porté par Atland, cette partie du territoire serait restée en situation de désertification. En devenant le premier projet livré dans le cadre d’Inventons la Métropole du Grand Paris, après trois ans de chantier, le campus Urban Valley pourra ainsi accueillir le Lab Crigen d’Engie, et L’Industreet, un campus financé par la Fondation Total. C’est en mélangeant de cette manière les activités et les populations que ce territoire deviendra un vrai lieu de vie.

Les ambitions

GR : L’idée directrice derrière notre proposition a été de ne pas trop densifier, en la limitant à 24 000 m2, malgré le grand terrain de 3,5 ha, et de favoriser la préservation de près de 5 000 m2 d’espaces verts. Nous avons à ce titre veillé à préserver des espaces communs partagés, des voies de circulation et des hauteurs contrôlées. Opter pour des structures mixtes bois et métal est particulièrement compliqué pour des immeubles d’activités, notamment en raison des grandes hauteurs sous plafond, mais relever ce défi nous a permis d’obtenir des certifications HQE Bâtiment durable et Breeam niveau Good. Nous avons par ailleurs toujours privilégié une adaptation aux besoins des utilisateurs tout en conservant une flexibilité et un potentiel de réversibilité. Cette opération, qui vient cocher toutes les cases de l’ESG, démontre que nous pouvons construire des bâtiments de qualité répondant parfaitement aux usages des occupants et raccordés aux réseaux de transports. Il y aura une demande locative intéressante.

SP :  Autour du site, on ne retrouve que des immeubles logistiques ou d’activités. Ce projet était donc une opportunité de montrer qu’il est possible de penser autrement ce type de programme. Le campus Urban Valley est d’abord intéressant parce qu’il intègre l’industrie dans la ville. D’ailleurs, avec comme point de départ la nouvelle gare du T11, ce site acquiert une nouvelle polarité en se raccordant à la gare du RER D. En outre, il se démarque par l’important projet réalisé avec le paysagiste, Agence Babylone, pensé afin que les immeubles soient positionnés en dialogue avec les espaces paysagers plutôt que comme des éléments indépendants. Le terrain ayant été particulièrement pollué, il nous a en effet paru nécessaire dans le cadre de l’intervention de dépollution de retrouver de la pleine terre et d’avoir un espace planté généreux, qui irrigue le site et participe à la gestion des eaux de ruissellement.

PO : Grâce aux trois éditions du concours, une centaine de villes auront de nouveaux quartiers ou immeubles se démarquant par une architecture exceptionnelle, alliant audace et ingéniosité. Choisis par un jury réunissant aussi les services de l’État, l’Ordre des architectes, la préfecture et le maire, ces projets permettent de mobiliser 10 Mds€ de fonds privés et de créer 80 500 emplois en période de construction et 61 500 emplois pérennes. Par ailleurs, puisque la Métropole du Grand Paris souhaite être avant-gardiste sur le plan écologique et en matière de biodiversité, comme en témoigne son schéma de cohérence territoriale (SCoT) adopté en janvier 2022 à 94,2 % des voix du Conseil de la Métropole, tous les projets que nous retenons dans le cadre du concours répondent à des critères stricts en matière de développement durable. 

Leurs bios

© Zoé Guenne

Georges Rocchietta 

Diplômé de l’Essec Business School et de l’ISG International Business School, Georges Rochietta a cofondé en 2003 le groupe Atland, dont il est depuis président-directeur général. Au cours d’une carrière lancée en 1988 chez Les Nouveaux Constructeurs en tant que responsable du développement, il a également occupé le poste de directeur général chez Park Promotion et Kaufman & Broad Développement.

© Zoé Guenne

Patrick Ollier

Fort d’une carrière politique au cours de laquelle il a notamment été député des Hautes-Alpes puis des Hauts-de-Seine, ministre délégué aux Relations avec le Parlement ainsi que président de l’Assemblée nationale, Patrick Ollier est maire de Rueil-Malmaison depuis 2004. Il est devenu en 2016 le premier président de la Métropole du Grand Paris, poste auquel il a été réélu en 2020.

© Zoé Guenne

Samuel Poutoux

Architecte DPLG depuis 2005 et après un passage chez Nexity où il a participé au développement du concept Ywood, Samuel Poutoux s’est associé en 2012 à l’architecte Rémi Crozat ainsi qu’à l’économiste et entrepreneur charpentier Marc-Henri Maxit pour créer l’agence Atelier WOA, acronyme de Wood Oriented Architecture. Parmi ses réalisations récentes figurent la Maison ONF, à Maisons-Alfort, la tour Commune, à Paris, ou encore l’immeuble mixte Paris Puce, porte de Clignancourt.

Leur projet commun

Issu de la première édition d’Inventons la Métropole du Grand Paris, le Campus Urban Valley est devenu, le 10 novembre dernier, la première opération inaugurée dans le cadre de l’appel à projets. Rendu possible par la transformation de l’ancienne friche industrielle des Tartres, à cheval sur les communes de Pierrefitte et Stains, le programme mixte de 24 000 m2 a été développé par le groupe Atland, avec le concours du cabinet d’architecture Atelier WOA et du paysagiste Agence Babylone. Il accueille aujourd’hui le centre de recherche Crigen d’Engie ainsi que le centre de formation L’Industreet, porté par la Fondation TotalEnergies, dans un bâtiment de 9 000 m2 alliant locaux d’activités et espaces tertiaires classiques pour le premier, et dans un immeuble 11 000 m2 adapté à l’enseignement tant académique que technique pour le second. En outre, l’opération propose un pôle services composé d’un restaurant inter-entreprise, de 1 300 m2 de commerces, ainsi qu’un parking mutualisé de 287 places. Celui-ci sera complété en 2023 par une résidence étudiante de 1 770 m2, répartis sur quatre niveaux, pour un total de 75 chambres individuelles. Disposant des certifications environnementales HQE Bâtiment durable et Breeam niveau Good, le programme est par ailleurs doté d’un parc végétalisé de 4 500 m2 ainsi que d’une centrale photovoltaïque sur la toiture des ateliers, dont l’électricité produite sera autoconsommée ou réinjectée sur le réseau en période de surproduction.

© Camille Gharbi et Arnaud Delente
© Michel Blossier pour Atland
© Camille Gharbi et Arnaud Delente

Article issu du Business Immo Global 191.

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