Haut
© Pierre-Olivier Deschamps, Agence Vu' pour la Samaritaine

La Samaritaine se gentrifie

En avril 2020, la Samaritaine, à Paris, se révélera (enfin) aux Franciliens et touristes sous ses plus beau atours. Fermée en 2005 pour des raisons de sécurité et acquise en totalité par le groupe LVMH en 2010 (qui en était actionnaire à 55 % depuis 2001), elle a fait l’objet d’un vaste programme de réhabilitation et de construction. Le projet a été mené de mains de maître par le cabinet d’architectes japonais Sanaa (Kazuyo Sejima et Ryue Nishizawa, prix Pritzker 2010), les architectes d’opération SRA Architectes et l’architecte en chef des monuments historiques Jean-François Lagneau.

Totalisant 70 000 m2, La Samaritaine abrite désormais un programme mixte associant un grand magasin, des bureaux, un palace (Le Cheval blanc, une marque détenue par LVMH), des logements sociaux et une crèche dans le stricte respect des exigences de la sécurité et de la valorisation du patrimoine architectural existant.

Elle se compose d’un ensemble hétérogène de quatre bâtiments – en majorité classés – implantés entre les quais de la Seine, au niveau du Pont-Neuf, et la rue de Rivoli.

Côté Seine, le bâtiment Art déco conçu en 1928 par Henri Sauvage accueillera l’hôtel du Cheval blanc qui comptera 72 clés, soit 26 chambres et 46 suites faisant face à Notre-Dame et la tour Eiffel. L’édifice a été réhabilité par Édouard François qui lui a donné une touche contemporaine, et aménagé à l’intérieur par Peter Marino autour du thème de la résidence parisienne telle un lieu de vie d’exception. Il faudra compter tout de même pour une nuitée 1 150 € pour une chambre standard…

Bâtiment d’Henri Sauvage qui accueillera le palace Le Cheval blanc. ©Pierre-Olivier Deschamps, Agence Vu’ pour la Samaritaine

Achevé en 1910 et de style Art nouveau, le bâtiment de Frantz Jourdain abrite la partie commerce. Ses façades ornementales en fer forgé, mosaïque, panneaux de lave émaillée, etc., sa verrière et ses escaliers spectaculaires ainsi que ses planchers de verre ont été rénovés dans les règles de l’art par des entreprises reconnues dans le monde entier pour leur savoir-faire.

La façade Art nouveau réalisée par Frantz Jourdain a été rénovée dans les règles de l’art. ©Pierre-Olivier Deschamps, Agence Vu’ pour la Samaritaine (2)

La partie la plus spectaculaire du projet est due à l’agence Sanaa, réputée pour son architecture légère et épurée, qui a construit un nouveau bâtiment, rue de Rivoli. Sa façade consiste en une ondulation irrégulière de panneaux de verre courbés et sérigraphiés qui fait vibrer son environnement par de multiples reflets. Le plissé de cette façade se perçoit, par son irrégularité étudiée au millimètre près, comme le tombé naturel d’un voile qui donne toute sa douceur au bâtiment et enveloppe le projet dans une modernité affirmée.

La façade réalisée par Sanaa rue de Rivoli se révèle d’une extrême modernité. © Pierre-Olivier Dechamps, Agence Vu’ pour la Samaritaine

La Samaritaine, dont la rénovation se chiffre à 750 M€, aurait pour ambition de faire lien avec la ville. Pour ce faire, l’exploitation commerciale a été confiée à DFS (également propriété du groupe de Bernard Arnault), leader mondial de la vente de produits de luxe destinés aux voyageurs internationaux à qui l’on doit la Fondaco Dei Tedeschi de Venise, qui projette de faire de la Samaritaine un haut lieu du commerce avec quelques 600 grandes marques. « La Samaritaine refera battre le cœur de Paris », affirme Éleonore de Boysson, présidente régionale Europe et Moyen-Orient de DFS. Celui des touristes, assurément. Mais celui des Parisiens, et plus largement, à l’heure du Grand Paris, celui des Franciliens ? L’avenir le dira. Une chose est certaine, hormis la qualité architecturale indéniable du projet et l’ambition de faire de la Samaritaine un lieu résolument de son temps, il semble qu’elle ne sera jamais plus cette cathédrale du commerce qui a inspiré Emile Zola dans Au bonheur des dames, accessible au plus grand nombre et fidèle à son slogan : « On trouve tout à la Samaritaine ! » Rendez-vous est donné en avril 2020 pour découvrir la Samaritaine d’une nouvelle ère.