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Silex2 / Olivier Estève, Béatrice Vessiller & Antoine Durand

Photos : © Jad Sylla pour business immo global

À un jet de pierre de la gare Lyon Part-Dieu, Covivio a livré cet automne Silex2, un ensemble immobilier signé par Ma Architectes et Arte Charpentier. Symbolisant la rencontre entre l’histoire architecturale lyonnaise et la fine pointe en matière d’espaces de bureaux, l’IGH de 30 700 m2 s’inscrit dans un quartier d’affaires en pleine redéfinition, à une époque où l’immeuble tertiaire repense ses codes pour mieux satisfaire ses occupants. Retour vers le futur du bureau avec Olivier Estève, directeur général délégué de Covivio, Antoine Durand, cogérant de Ma Architectes, et Béatrice Vessiller, vice-présidente en charge de l’urbanisme et du cadre de vie à la Métropole du Grand Lyon.

L’histoire

Olivier Estève : Covivio, à l’époque Foncière des Régions, a acquis en 2001 les sièges régionaux d’EDF, dont le site de Lyon Part-Dieu. Sur cette emprise, nous avions deux immeubles et deux situations très différentes : un premier bâtiment technique, pour lequel nous avons réalisé une démolition/reconstruction, livré en 2017 et baptisé Silex1 ; et la tour, élément architectural remarquable pour le quartier, que nous avons choisie de conserver. Cependant, celle-ci n’était plus du tout adaptée aux usages tertiaires du moment de par son accès, qui anticipait un urbanisme de dalle n’ayant jamais été réalisé à la Part-Dieu. De plus, sa configuration en matière d’espaces et de plateaux ne répondait pas aux attentes d’aujourd’hui au sein d’un immeuble de bureaux. L’enjeu était donc de reconnecter cet ensemble monumental au quartier et de le moderniser quant à ses usages et fonctions, notamment en agrandissant les plateaux, ainsi qu’en offrant plus de flexibilité et de services. La solution a été d’accoler une nouvelle tour à l’ancienne, ce qui a permis d’augmenter la surface et la luminosité de chaque étage, en proposant des plateaux de 400 m² libres de toute structure. 

Antoine Durand : Nous avons été approchés en 2008 afin de concevoir un premier projet de revalorisation du bâtiment, conçu par le grand architecte lyonnais Jean Zumbrunnen. Notre première conclusion était alors que le rapport de l’immeuble à la rue était impossible, puisqu’il avait été pensé avec l’anticipation d’un urbanisme de dalle qui n’a pas été connecté. L’accès se faisait en conséquence par des escaliers plutôt baroques. Notre premier projet consistait donc à démolir le socle et reconstruire avec l’accès depuis la rue. Les plateaux, qui faisaient 600 m², noyau compris, ne permettaient cependant pas la viabilité du projet. Quand celui-ci a été arrêté, nous avons beaucoup réfléchi sur les objectifs de surfaces à atteindre, en reliant par exemple l’édifice existant à une nouvelle tour. Nous avons par ailleurs constaté que le noyau était surdimensionné ; ainsi, après des études réalisées par des ascensoristes sur la capacité du noyau en matière de circulation verticale, nous avons conclu qu’il était possible de rajouter environ 400 m² par niveau. Cela nous a donc permis de dimensionner une extension, qui fait passer la surface de 12 000 à 22 000 m². Cette réalisation est une véritable prouesse technique, puisque cette nouvelle tour est accolée par un seul point au bâtiment existant et s’élance à près de 130 m de hauteur.

Béatrice Vessiller : Ce projet s’inscrit dans le cadre du grand projet de la Part-Dieu, historiquement un quartier d’affaires et d’activités, afin d’étendre plus globalement ses fonctions et en faire un quartier à vivre. Dans la première partie de ce programme, l’idée que le bâtiment pouvait être conservé et augmenté était assez atypique, puisqu’il avait plutôt été décidé pour beaucoup d’autres opérations du secteur de faire tabula rasa et de reconstruire. Par sa logique de régénération d’un bâtiment existant, qui est à privilégier lorsqu’elle est possible, ce projet est donc emblématique sur le plan architectural et environnemental, par une réhabilitation/extension très volontariste qui préfigure d’autres opérations du même acabit dans le quartier de la Part-Dieu.

La vision

AD : Nous avons avant tout voulu faire un projet pour la Part-Dieu à partir de son vocabulaire architectural. Conserver la tour existante est évidemment vertueux d’un point de vue environnemental, mais aussi une façon de rendre justice à un élément remarquable de l’architecture de ce quartier, un exemple marquant du brutalisme lyonnais. C’est pourquoi nous avons conservé ce pied en béton, que nous l’avons rénové et mis en valeur à l’extérieur comme à l’intérieur. Parce que la culture architecturale du secteur s’inscrit avec beaucoup de relief, nous avons réfléchi autour d’un système de modénatures pour la façade. Et puisque ce quartier des années 1970 est assez minimaliste dans l’utilisation des matériaux, nous nous sommes limités au béton, à l’aluminium et au verre, et avons opté pour l’anodisation et le gris foncé.

OE : La qualité d’usage était la valeur cardinale de cette opération. Nous avons demandé à Antoine et son équipe un projet proposant des plateaux d’au moins 1 000 m², avec des espaces dégagés permettant d’accueillir toutes les formes d’organisation du travail et de rendre utile chaque mètre carré au profit de l’occupant. De plus en plus d’utilisateurs optent aujourd’hui pour des modèles d’occupation faisant la part belle aux espaces collectifs. Ainsi, au sein de Silex², en plus des espaces privatifs, les occupants bénéficient des différentes surfaces collectives et des nombreux services offerts par la tour, notamment un auditorium de 140 places doté d’un foyer directement connecté à une terrasse, un espace fitness, une zone de restauration ouverte sur l’extérieur et 1 700 m² végétalisés. Par ailleurs, nous avons privilégié le confort des utilisateurs avec plus de 90 % des espaces exposés en premier jour et des plafonds rayonnants, produisant le chaud et le froid, qui sont reliés aux réseaux urbains. De tels atouts nous ont permis de séduire des entreprises de premier plan, comme Solvay ou Microsoft.

BV : Depuis un an et demi, notre nouvel exécutif de la Métropole s’est réinterrogé sur le projet Part-Dieu et a cherché à réorienter un certain nombre de sujets, notamment en faveur du logement abordable. Notre nouvelle vision du quartier est de ne plus autoriser des immeubles de grande hauteur, à la fois pour des questions environnementales, mais aussi de charges que génèrent ces édifices pour les entreprises qui y habitent. Même si nous comprenons l’important rôle tertiaire que jouera toujours ce quartier dans la métropole, nous avons réduit d’environ 20 % le programme de construction en matière de bureau, mais il reste encore 200 000 m2 à construire. Dans les dix ans, 1 400 logements seront réalisés dans le quartier de la Part-Dieu, avec une attention particulière sur leurs prix et leurs typologies. Cela découle également d’une volonté de rééquilibrer les fonctions tertiaires sur d’autres secteurs de la métropole.

© Jad Sylla pour business immo global
© Jad Sylla pour business immo global

L’enjeu

AD : Le projet a été conçu pour être le plus souple possible et qu’il s’adapte à toutes les configurations. Sa pérennité tiendra donc dans sa capacité à s’adapter à tous les modes de travail, tant ceux connus que ceux qui viendront dans le futur. Pour ce faire, les plateaux peuvent être divisés de manière à proposer jusqu’à six lots indépendants. Dans la même gaine technique, un espace de 1,20 m, à la jonction de la tour existante et de l’extension fait passer tous les réseaux nécessaires à l’extension, comme l’hydraulique, le traitement de l’air ou le désenfumage, ce qui nous permet d’avoir un plateau dégagé, exempt de tuyaux ou de structures et de maximiser la modularité.

OE : Notre ambition est d’offrir un niveau de services et de performance jamais atteint en région, en cassant l’idée que les plus beaux immeubles sont uniquement réalisés à Paris ! Cet objectif est clairement atteint avec Silex². Il s’agit d’un lieu de vie ultra-qualitatif pour les entreprises qui y évoluent, qu’il s’agisse de grands comptes, ou bien de plus petites structures. En effet, nous y avons implanté sur 5 800 m² un site Wellio, notre offre d’espaces flexibles, avec la possibilité pour les clients qui le souhaitent d’occuper un à plusieurs centaines de postes de travail, pour une durée de quelques semaines à plusieurs années.  À l’image du réseau dans son ensemble, Wellio fonctionne en synergie avec l’immeuble dans lequel le site est implanté puisque les occupants de la tour peuvent aussi profiter des salles de réunion qui y sont proposées. Autre aspect clé de Silex² : son ouverture sur la ville. En ce moment, une galerie d’art éphémère accessible à tous est installée sur 300 m² au rez-de-chaussée de la tour. En parallèle, l’auditorium et sa salle de réception sont aussi privatisables par des entreprises extérieures. En bref, que ce soit en matière d’usage, d’environnement, d’architecture, d’ouverture sur la ville… Silex² incarne ce que recherchent les entreprises aujourd’hui et recrée le lien avec la ville et ses habitants.

BV : Pour l’avenir, nous privilégierons la connexion du bâti avec l’espace public, des lieux davantage végétalisés et une conception de la ville plus perméable. La rue des Cuirassiers sur laquelle donne ce bâtiment va par exemple être réagencée dans une perspective d’apaisement et de végétalisation, avec des aménagements cyclables, une mise à sens unique et un traitement qualitatif de l’espace à vivre, qui ne sera plus simplement un espace de circulation en voiture. Des aménagements sont aussi prévus entre la gare et le bâtiment, puisque le mail Bouchut, qui devait initialement être une nouvelle rue, sera plutôt paysager et dédié aux piétons ainsi qu’aux vélos, avec un boisement de 1 ha planté en vis-à-vis du parvis de Silex2. Finalement, de nouvelles lignes de transports en commun seront ajoutées dans le quartier de la Part-Dieu, qui est déjà le mieux desservi de la métropole. Nous serons dans un vrai quartier à vivre, pour les habitants comme les actifs venant y travailler. Nous amplifions aussi la nouvelle vision de la Part-Dieu avec des socles actifs et des sols perméables et vivants.

Cogérant du cabinet Ma Architectes depuis 2007, Antoine Durand a exercé sa carrière au sein des cabinets Dominique Perrault Architecture, Architecture Studio, Valode et Pistre, Aukett Europe, et Arquitectonica. Diplômé de l’École d’architecture Marseille Luminy, il compte parmi ses réalisations la tour Exaltis et le rehaussement de la tour Manhattan, à La Défense, ainsi que le projet EOS Generali, siège de Microsoft à Issy-les-Moulineaux.
Ingénieur géomètre diplômé de l’École spéciale des travaux publics, Olivier Estève occupe depuis maintenant dix ans le poste de directeur général délégué de Covivio après avoir rejoint l’ancienne Foncière des Régions en 2002. Il avait auparavant lancé sa carrière au sein du groupe Bouygues Construction, notamment en tant que directeur du développement de sa filiale Screg Bâtiment.
Deuxième vice-présidente en charge de l’urbanisme et du cadre de vie, Béatrice Vessiller a intégré la Métropole du Grand Lyon en juillet 2020 à la faveur de l’élection de la nouvelle majorité écologiste. Elle a passé les 14 années précédentes en tant que responsable de la conception pédagogique à l’École nationale des travaux publics de l’État, après un parcours au ministère de la Transition écologique et solidaire, où elle a occupé différents postes en lien avec les problématiques de mobilité et d’urbanisme.
© Jad Sylla pour business immo global

Leur projet commun

À proximité immédiate de Silex1, son opération tertiaire de 10 700 m² livrée en 2017, Covivio a inauguré cet automne à Lyon Silex2, un IGH de 30 700 m² signé Ma Architectes et Arte Charpentier. Mais là où la foncière cotée, avec ce premier opus, avait opté pour une démolition/reconstruction, elle mise cette fois sur une extension de la tour EDF existante, héritage de l’architecte lyonnais Jean Zumbrunnen, via un volume de 10 000 m² accolé à la façade nord et culminant à 129 m de haut. Relié par un hall de 380 m2 et haut de 8 m, un second immeuble de 9 000 m² vient compléter l’ensemble. Inscrite au sein du quartier de la Part-Dieu en pleine mutation, l’opération s’ouvre à la ville avec un socle actif de 300 m², une cafétéria de 300 couverts quotidiens donnant sur la rue, ou encore un auditorium de 140 sièges. En outre, elle entend inviter à Lyon les codes les plus qualitatifs de l’immobilier tertiaire, notamment avec des plateaux flexibles de 1 000 m², une lumière en premier jour pour 90 % des espaces de travail ainsi que 1 700 m² de terrasses. Comptant parmi ses locataires les groupes Solvay, Microsoft et Archimed, Covivio proposera en outre un espace de coworking de 5 000 m² opéré par sa filiale Wellio.


Article issu du numéro 181 de Business Immo Global.

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