Haut

Le métavers dans l’immobilier : tout ce qu’il peut (ou pas) apporter

Karine Olivier, directrice générale du pôle Services aux particuliers de Nexity prend la plume sur in interiors au sujet du métavers dans l’immobilier. Encore mal connu du grand public, celui-ci offre de nombreuses perspectives d’investissement, parfois à tendance spéculative. Appliqué au secteur immobilier, cette technologie web 3 pourrait toutefois revêtir une utilité sociale en réinventant la relation client, la fluidification de la collaboration entre les parties prenantes et l’équipement des acteurs par des modèles prévisionnels pointus, comme autant d’aides à la prise de décision. Décryptage.

 

Si le principe de cette hybridation du réel et du virtuel n’est pas une nouveauté totale – on se souvient de Second Life, cet univers virtuel lancé il y a déjà près de 20 ans, et qui compterait encore quelque 600 000 joueurs aujourd’hui –, le métavers, et plus précisément le métavers dans l’immobilier se démarque par une ambition nouvelle. La plate-forme n’a plus pour seule vocation le divertissement du public, mais ambitionne désormais de réconcilier le monde réel et le monde virtuel pour décupler les potentialités financières et d’usage. Ainsi en 2021, 500 M$ ont été dépensés en biens immobiliers dans le métavers. Malgré des contours encore flous, il s’impose dans le débat public et représente un enjeu de taille : en dépit du risque de dérive spéculative le métavers présente-t-il toutefois une véritable utilité sociétale ?

 

Mode d’emploi

Le principe du métavers dans l’immobilier repose sur la possibilité de posséder des biens virtuels, rares, et parfois uniques, à visiter casque de réalité virtuelle vissé sur la tête. Ce sont les NFT, ces « jetons non fongibles », qui certifient la propriété et l’unicité des objets dans le métavers. À travers ces jetons, les mondes physique et digital se côtoient et s’entremêlent, permettant aux entreprises et aux particuliers de faire fructifier leur patrimoine dans l’espace virtuel.

En ce qui concerne l’immobilier, les entreprises achètent des surfaces de pixels, ou « territoires virtuels », aux acteurs qui les possèdent. À quoi servent ces espaces digitaux, et que peut-on y faire ? « Ce qu’on veut ! », vous répondrait avec enthousiasme Jean-François Hollender, directeur général de l’agence de communication événementielle Whit Up Com. Pour lui, le métavers est un nouveau média, un nouveau terrain d’expression pour les marques, un nouveau moyen de travailler la relation client. Concrètement, il s’agit pour les entreprises de recréer dans le métavers un univers aux couleurs de la marque, qui proposerait une expérience digitale forte, immersive et émotionnelle. Un cadre idéal pour transmettre aux consommateurs les valeurs définissant la raison d’être d’une entreprise.

Les modalités d’interaction entre l’entreprise et le client sont quasi infinies et vont de la reproduction virtuelle d’événements traditionnels (cocktails, soirées, conférences, etc.) à leur dépassement par le biais du digital. Sur un espace du métavers baptisé Decentraland, les défilés de la Fashion Week (notamment D&G) ont par exemple fortement marqué les esprits. Loin des contraintes culturelles imposées par le réel, les spectateurs du défilé virtuel ont pris les libertés que leurs avatars leur laissaient et sont apparus affublés des costumes les plus loufoques, volant ainsi la vedette aux mannequins du tapis rouge. Une dérive qui n’est pas passée inaperçue aux yeux de certains décideurs, inquiets de la perte de contrôle que l’interaction virtuelle rend possible.

 

Mettre le virtuel en cohérence avec réel

Karine Olivier, directrice générale du pôle Services aux particuliers et membre du Comex chez Nexity, s’intéresse de près à la question. Pour elle, la priorité doit être l’usage : pour ne pas « rester perché dans un monde virtuel » qui n’entrerait jamais en cohérence avec le réel, il faut se recentrer sur le client et sur ses besoins. Le spéculatif « crée une distance avec le grand public » confirme Aldo Kei-Taud, cofondateur de Fragment, une agence de conseil spécialisée dans les technologies NFT, blockchain et métavers.

Tour d’horizon des services « utiles » que le métavers peut proposer :

  • L’acheteur d’un bien immobilier pourrait profiter de visites virtuelles indépendamment des contraintes géographiques. Grâce au système des NFT, un nouveau système ultra-sécurisé d’accession aux droits de propriété pourrait également exister.
    • Les concepteurs pourraient collaborer plus facilement dans le métavers grâce à la mutualisation du BIM.
    • Les entreprises pourraient utiliser les modélisations virtuelles des territoires réels pour réaliser toute une série de simulations, et faire ainsi du métavers un outil de prévision et d’aide à la décision, à l’instar de Nexity qui a déjà avancé dans ce sens en modélisant les crues de la Seine dans le nord de Paris grâce au métavers.
    • Le métavers, enfin, pourrait servir de nouveau support à la relation client – entreprise, si cette dernière proposait une expérience forte, représentative de l’identité de la marque et adaptée aux intérêts des différents segments de consommateurs (RSE & solidarité, investissement & profitabilité, etc.).

En bref, l’utilisation du métavers est une opportunité de décloisonnement et de collaboration pour tout le secteur.

 

Le métavers dans l’immobilier : des limites à définir

L’obstacle majeur à la démocratisation de ces pratiques réside aujourd’hui dans la faiblesse de la législation actuelle. Pour l’heure, « code is law » : ce sont les codeurs qui imposent leurs règles, laissant nécessairement se créer derrière eux une zone grise juridique. De plus, dans une société d’image où le client exprime un besoin fort de fluidité et de réalisme dans la simulation virtuelle, les visites digitales pourraient mener à des litiges si elles n’étaient pas jugées assez fidèles à la réalité. Enfin, l’enjeu de la centralisation du métavers reste le défi le plus crucial à relever si l’immobilier digital devait s’imposer comme un nouveau segment à part entière du secteur. Pour l’heure, les différentes entités constituant le métavers ne communiquent pas entre elles et ne permettent pas de mutualiser les avatars et les actifs au sein d’une seule et même plate-forme, causant ainsi un morcellement potentiellement dommageable.

Pour appréhender au mieux ces incertitudes et relever le défi de l’intégration du métavers aux outils et aux méthodes de travail, Karine Olivier mise sur l’ADN de l’innovation inhérent au Groupe Nexity. D’après elle, il faut « apprendre en marchant » : commencer modestement, mais sans attendre, en comptant à la fois sur la puissance innovante des générations entrantes sur le leadership de Nexity dans le secteur de l’immobilier et sur sa culture clients orientée sur une expérience dont le moteur est l’émotion positive.

 

 

 ⇒ Cet article fait partie d’une série de contenus publiés sur Regards croisés, le magazine « B to B » des nouveaux usages de l’immobilier tertiaire, édité par Nexity Solutions Entreprise.

 

 

 

Karine Olivier, directrice générale du pôle Services aux particuliers de Nexity

Karine Olivier a rejoint Oralia, au moment du rachat par Nexity, en tant que directrice générale. En octobre 2019, elle est également déléguée régionale de la région Auvergne-Rhône-Alpes-Bourgogne-Franche Comté, pour l’ensemble du groupe. Depuis octobre 2020, Karine Olivier est nommée directrice générale du pôle Services aux particuliers de Nexity afin de développer les métiers de l’administration de biens du groupe, au plus près des enjeux actuels et des besoins des clients.

 

Photos : en ouverture : © Adobe Stock/Kinwun ; portrait : © E. Legouhi