Question de formes « made in Japan »
Photo à la Une : Alphaville Architects, Église catholique de Suzuka, département de Mié, 2015 – © Toshiyuki Yano
Le Japon a toujours été un laboratoire d’architecture, et Tokyo, le lieu privilégié de bien des expérimentations et extravagances formelles. Aujourd’hui, des projets en ville comme dans la nature repositionnent le débat entre forme et environnement, dressant le panorama d’une nouvelle architecture japonaise tournée vers des concepts plus éthiques.
L’éclatement de la bulle spéculative et le séisme de Kobe en 1995 marquent la fin du post-modernisme et du déconstructivisme. Après le grand séisme de l’est du Japon en 2011, les relations à l’environnement au sens large deviennent plus importantes que les formes sculpturales expressives. L’exposition « Quand la forme parle – Nouveaux courants architecturaux au Japon (1995-2020) » présente jusqu’au 19 février prochain à la Maison du Japon, à Paris, 64 projets signés par 35 agences d’architecture, toutes nées après l’éclatement de la bulle spéculative au Japon au début des années 1990. Ces nouvelles approches formelles s’intègrent dans des environnements variés, en phase avec les communautés locales, révélant aussi l’importance croissante des femmes architectes avec 13 d’entre elles représentées dans la lignée des Japonaises, comme Itsuko Hasegawa ou Kazuyo Sejima, qui ont longtemps fait figure d’exceptions dans le domaine.
Forces en présence
Pour Kentaro Takeguchi et Asako Yamamoto d’Alphaville Architects (photo à. la Une) « la forme naît d’un parfait équilibre entre les poussées conjointes de la force de l’environnement extérieur et de la force intérieure produite par l’activité humaine ». Évoquant une chaîne de montagnes, le grand toit de l’église catholique de Suzuka, qu’ils ont construite en 2015,
en est aujourd’hui le symbole.
Autre lieu de culte, la chapelle Agri (2016) de Yu Momoeda s’inscrit dans un site cerné d’arbres à proximité de la cathédrale en bois d’Oura, bien connue des habitants de Nagasaki. « La forme est la langue par laquelle l’architecture dialogue avec l’environnement. J’ai donc cherché ici à créer l’expérience simultanée entre l’environnement naturel et l’histoire de la ville », précise l’architecte.
Dans une zone industrielle au pied du mont Fuji, le jardin d’enfants Muku (2018) de Tezuka Architects adopte un « plan à bulles ». S’inspirant du bol qui accompagne le bentô, cette crèche incite les enfants à parcourir l’espace, car pour ce couple d’architectes « la forme, c’est la vie ». Tous ces projets « made in Japan » démontrent bien, pour citer l’historien et commissaire de l’exposition Tari Igarashi, « que le pouvoir immuable de l’architecture réside dans ses formes ».

Article issu du numéro 182 de Business Immo Global.
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