Qui est Anne Démians, première femme architecte élue à l’Académie des beaux-arts ?
« J’ai idéalisé l’architecture. Tout est parti d’une conviction précoce que les architectes dessinaient des rêves. J’ai préservé cette intuition d’enfance, car elle me permet quotidiennement de transformer toutes les complexités que je rencontre en acte créatif », explique l’architecte et urbaniste française.
Avait-elle également idéalisé être un jour élue à la section d’architecture de l’Académie des beaux-arts ? C’est en tout cas ce qui est arrivé le 18 janvier 2023, date à laquelle l’architecte s’est vu être installée par le photographe franco-brésilien Sebastião Salgado.
De ce fait, elle est devenue à 59 ans, la première femme architecte installée dans la section architecture de l’Académie des beaux-arts. Anne Démians a été élue en juin 2021 à l’Académie des beaux-arts, au fauteuil IV de la section d’architecture, précédemment occupé par Roger Taillibert.
Lors de son intervention sous la coupole de l’Académie des beaux-arts, Anne Démians a rappelé : « À nous donc, artistes, philosophes, écrivains, musiciens, photographes, scientifiques, chorégraphes et architectes de cette académie de rapprocher nos disciplines, d’additionner nos compétences, de mettre en commun nos projets », convaincue que la rencontre des disciplines nourrit l’esprit et permet d’avancer librement.
Une carrière toute dessinée
Née le 26 octobre 1963 à Colmar, Anne Démians a toujours su qu’elle serait architecte. Sa grand-mère voyageait et dessinait beaucoup. C’est elle qui lui a donné envie de faire ce métier. Elle pensait qu’il suffisait que l’architecte dessine ses rêves pour qu’ils se réalisent. Idée fantasmée de l’architecture comme un art au croisement du dessin et d’un regard sur l’histoire. Intérêt d’ailleurs hérité de son grand-père, Henri Drouot, historien, correspondant à l’Académie des sciences sociales et politiques.
Diplômée de l’École nationale supérieure d’architecture de Versailles, elle suit les cours de l’architecte Henri Gaudin et travaille pendant sept ans au sein de son agence. Elle y suivra de nombreux projets dont le musée Guimet à Paris, la faculté des Sciences d’Amiens, jusqu’au palais de justice de Nantes.
« L’architecture est un vecteur incontournable de la société dans laquelle elle agit, témoin incontestable de notre histoire. Elle est cette matière première et active qui nous propulse, interrogatifs, dans les transformations rapides du progrès et des règles de vie. L’architecture joue bien un rôle social, culturel, esthétique, économique et politique. À condition, bien sûr, que l’on considère l’importance de son impact dans la sauvegarde et le développement de la planète », affirme l’architecte.
Anne Démians crée sa première agence en 1995 à Montreuil. Dix ans plus tard, elle fonde l’agence Architectures Anne Démians dans le 10e arrondissement de Paris.
Lauréate du projet de redéfinition du quartier et de la gare de Vilnius en Lituanie en 2022, elle finalise actuellement le complexe thermal de Nancy, exceptionnel par son ampleur, sa charge historique et symbolique, par le dialogue assumé entre patrimoine et modernité.
L’environnement comme clé de voûte
Anne Démians propose de repenser intelligemment la ville du futur et veut inviter à des changements profonds qui s’exerceraient dans l’acte de construire et d’aménager le territoire. La question environnementale s’est imposée dès 2009 lorsqu’elle remporte le concours Bas Carbone initié par EDF. Elle propose déjà, à ce moment-là, une nouvelle façon de penser le logement.
Elle construit les premiers bâtiments réversibles, les Black Swans à Strasbourg, livrés en 2019, pour le compte d’Icade Promotion. Selon Anne Démians, « il faut remettre à jour et refaire vivre des procédés constructifs industrialisés, économiquement crédibles, avec pour idée d’anticiper une réversibilité d’usage, dès la conception de l’ouvrage et quelle que soit la destination d’origine ».
Anne Démians développe un modèle écoresponsable fondé sur l’alliance entre un environnement naturel, un investissement de tous les acteurs de la construction, une utilisation optimale des savoir-faire locaux, et une architecture innovante. C’est le cas avec la réhabilitation et l’extension des thermes de Nancy. Elle injecte dans le projet de construction une vision inédite et pointue de nouvelles pratiques thermales et invente une architecture spécifique, forme d’intemporalité qui embrasse les époques.
Anne Démians est également membre du conseil d’administration de la Maison de la culture du Japon, à Paris, membre du conseil d’administration de la Cité de l’architecture et du patrimoine et contribue aux travaux du groupe de travail RBR 2020-2050 (Plan Bâtiment Durable).
