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Quand l’architecture repousse les limites intérieures extérieures 

Frédéric Quevillon, architecte et fondateur de L’Atelier AConcept, prend la plume sur in interiors pour donner son point de vue sur la relation entre l’intérieur et l’extérieur pour fluidifier le lien entre ces espaces et augmenter celui avec la nature.

 

La relation induite par les espaces extérieurs et intérieurs est à l’origine de toute création chez un architecte. Il est de notre devoir de prendre en compte les éléments composant l’environnement dans lequel s’inscrit le projet, afin de pouvoir le penser de l’intérieur vers l’extérieur. Cela revient à dire que l’architecte pense son projet de la rue jusqu’à l’interrupteur, de la ville jusqu’à la chambre. Cette extension de la conception tend à se fondre dans une dimension urbaine, permettant aussi de sortir de l’opposition des métiers d’architecte d’intérieur/d’architecte/d’urbaniste, pour reprendre une vision globale du métier, comme c’était le cas « long time ago ».

Penser au-delà des espaces prédéfinis et faire rentrer la ville, l’extérieur dans le projet est au centre de notre métier d’architecte. Cela est notamment rendu possible grâce à des cœurs d’îlots parfois traversants, de grandes baies vitrées ou encore des patios qui laissent une place à la nature tout en floutant les limites indoor/outdoor.

Faire sauter les limites, s’ouvrir sur l’extérieur et apporter de la fluidité aux espaces est une volonté parfaitement portée par le travail du maître incontesté Mies van der Rohe. À travers des « structures claires », le cœur de son ouvrage consistait à trouver des solutions pour ouvrir les espaces, décloisonner les ensembles dans le but d’abroger les usages prérequis souvent imposés par les contraintes techniques. Ainsi, grâce à de grandes baies de verre venant se substituer aux murs, il floutait les limites entre intérieur et extérieur, et apportait un regard nouveau à l’environnement. Ce rapport à l’espace extérieur mêlé à ce besoin de végétalisation et de lumière au sein des immeubles est une question fondamentale aujourd’hui, encore plus en période de confinements successifs.

Flouter ces limites spatiales est également une réponse à un constat sociétal qui fait état depuis quelques années déjà : notre rapport à la nature parfois abîmé à cause d’une digitalisation accrue. La plupart des métiers s’exécutant face à un écran, il est nécessaire de pouvoir travailler et habiter (au-delà du télétravail) dans des lieux qui nous permettent un confort certain, de faire des pauses relaxantes et de nous déconnecter, en se recentrant sur la nature et les bienfaits que cela nous procure.

Finalement, nous pouvons même aller au-delà de ce postulat : encore faut-il que ces espaces extérieurs existent, et c’est peut-être là que doit se situer le combat. Pour le secteur résidentiel, les espaces extérieurs doivent être dorénavant assurés, pourquoi pas partagés lorsqu’il s’agit d’appartements et surtout, il faudra végétaliser les habitations au maximum. Il faudrait revenir aux « basiques » encore une fois, de manière cohérente et saine. Concernant les équipements, il en va de même : dans les écoles, par exemple, il serait intéressant de laisser davantage la place dans les cours de récréation aux arbres et à la terre (en opposition à l’artificialisation des sols récréatifs), et penser les intérieurs ouverts sur les extérieurs.

 

Frédéric Quevillon est architecte fondateur de L’Atelier AConcept. L’Atelier Aconcept affûte au quotidien ses méthodes depuis 2001 et mise sur son équipe pluridisciplinaire. Architectes, urbanistes, économistes, graphistes mettent leurs points de vue en commun au service de projets très différents, tous créant du lien dans l’espace urbain. La réussite future du bâtiment réside dans la façon dont il s’intégrera dans son environnement, dont il favorisera les liens entre les habitants et dont il stimulera de nouveaux usages au cœur de la ville.

 

 

 

 

Photo à la Une : Salle de boxe à Savigny-le-Temple réalisée par l’Atelier AConcept. © 11h45. Portrait : © Olivier Desaleux