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Prologis Park Moissy 2 DC1 / Cécile Tricault, Line Magne & Sébastien Laizet

Photos : Margaux Demaria pour Business Immo Global

Première plate-forme logistique carbone neutre au monde, le Prologis Park Moissy 2 DC1 a été réhabilité sur une ancienne friche industrielle, à Moissy-Cramayel. Exploité par Monoprix, ce projet d’envergure allie innovation et développement durable. Le point avec Cécile Tricault, Regional Head Southern Europe chez Prologis, Line Magne, maire de Moissy-Cramayel, et Sébastien Laizet, directeur logistique chez Samada, groupe Monoprix.

Le projet

Line Magne : L’histoire logistique de ce site remonte aux années 1970, quand PSA Peugeot Citroën a acheté à des agriculteurs un foncier pour implanter à Moissy-Cramayel son centre de pièces de rechange européen. Déjà à l’époque, il était clair que le site était bien situé, à 35 km de Paris, et bien desservi par les infrastructures autoroutières. Lorsque PSA a connu quelques difficultés et a choisi de fermer son site, celui-ci devint une friche pendant quelques années avant que Prologis, qui s’était déjà déployé au nord de la commune, ne s’en porte acquéreur. Une des actions mises en œuvre par Prologis a été de densifier le foncier par la construction de différents entrepôts, jusqu’à démolir un bâtiment existant pour y construire cette plate-forme logistique XXL accueillant Monoprix-Samada.

Cécile Tricault : Prologis est arrivé à Moissy-Cramayel il y a plus de 20 ans avec l’acquisition d’un site et le développement d’un premier parc logistique de l’autre côté de la ville, dont les derniers immeubles ont été construits il y a environ dix ans. Après nous être portés acquéreurs en 2011 de la friche industrielle de 60 ha libérée par PSA, un site sur lequel il y avait à l’origine une surface construite d’environ 100 000 m2, nous avons développé le parc Moissy 2 Les Chevrons, un campus de plates-formes logistiques de 240 000 m2. En livrant en septembre dernier ce bâtiment de 100 000 m2 à Monoprix-Samada, nous avons finalisé la construction et l’aménagement, incluant les accès, les espaces verts et les éléments mis en place pour rendre la vie des collaborateurs agréable sur ce site. Il est à noter que, là où le site de PSA employait généralement entre 800 et 1 000 personnes selon les pics d’activités, ce parc logistique accueille entre 1 500 et 2 000 personnes.

Sébastien Laizet  : Monoprix détenait trois bâtiments à Combs-la-Ville et Lieusaint, exploités par la Samada, filiale logistique du groupe, à quelques kilomètres de Moissy-Cramayel, représentant des surfaces totales de 87 000 m2. Cette activité logistique était arrivée à saturation, ce qui occasionnait un besoin de mètres carrés supplémentaires tant pour notre activité magasin que pour notre activité e-commerce. Nous avions initialement estimé notre besoin à près de 110 000 m2, avec la volonté de rationaliser notre implantation sur un seul bâtiment, si possible, mais ce type de produit peut être difficile à trouver. Nous avons été attirés par cette proposition de Prologis. En effet, ce parc est situé à proximité de nos sites et parfaitement inscrit dans nos objectifs RSE. Nous avons conçu des solutions de robotisation nous permettant de rationaliser encore davantage notre besoin de surface.

Les vertus

CT : Ce bâtiment est l’aboutissement d’une démarche d’innovation engagée depuis une dizaine d’années. Celle-ci s’est particulièrement intéressée à des éléments comme l’isolation des bâtiments, la production d’électricité, l’éclairage, les consommations énergétiques et la biodiversité. Au moment de concevoir cet actif avec l’ambition d’obtenir différents labels environnementaux, nous avons constaté qu’il était possible de réaliser un immeuble carbone neutre sans pousser tellement plus loin les options à notre disposition. Nous avons ainsi réalisé un immeuble en réduisant de 80 % ses émissions carbone sur son cycle de vie de 50 ans, la part marginale étant compensée par des actions de reforestation, pour partie en France. En plus d’être stable thermiquement, cet immeuble produit de l’énergie solaire, avec des panneaux photovoltaïques au toit, et mise sur une solution de géothermie. Il est par ailleurs alimenté uniquement par l’électricité et, à cet effet, il sera relié à une centrale photovoltaïque dédiée située dans le sud du pays. Aussi, en plus de miser sur une structure alliant le bois et, pour partie, le béton bas carbone, il est doté d’un système de récupération des eaux de pluie pour limiter l’imperméabilisation des sols ainsi que d’espaces verts pour soutenir la biodiversité. En outre, ce site a été pensé avec l’aide d’un écologue pour intégrer un verger et réintroduire de la faune et de la flore.

SL : Le groupe Casino, dont Monoprix est une filiale, porte un objectif fort de neutralité carbone à horizon 2040. Parce que nos engagements immobiliers se signent sur le long terme, 12 ans en l’occurrence, nous devons prendre dès maintenant les décisions qui nous permettront d’atteindre ces cibles. Mais au-delà des labels, ici Breeam Outstanding et Well, nous nous intéressons avant tout aux enjeux qu’ils portent et à notre capacité à les conjuguer à notre exploitation. Pour nous, ce bâtiment se démarque aussi parce que les labels obtenus sont toujours conciliables avec notre projet humain ou avec notre modèle économique. D’ailleurs, les enjeux environnementaux, économiques et de bien-être vont de pair. Par exemple, la lumière naturelle abondante, 50 % de plus qu’un bâtiment standard, offre certes des économies d’énergie, mais aussi une qualité d’usage importante à nos collaborateurs. Dans la même logique, l’isolation thermique permet de conserver des conditions tempérées, même en temps de grande chaleur ou de grand froid. Alors que l’évolution actuelle du prix du gaz fait que ce bâtiment est notre seul entrepôt, toute surface gardée, où nos coûts énergétiques ne sont pas en augmentation par rapport à 2021.

LM : Les acteurs de la logistique ont bien compris que les questions environnementales deviendraient majeures après la prise de conscience du réchauffement climatique. Dans la même veine, la qualité des installations et des conditions de travail des collaborateurs s’impose de plus en plus dans le raisonnement des logisticiens. À ce titre, le bâtiment réalisé par Prologis est remarquable et nous sommes reconnaissants d’accueillir à Moissy-Cramayel le premier bâtiment logistique carbone neutre au monde. Par ailleurs, Prologis porte une conception du parc d’activités qui convient tout à fait à une ville dans la mesure où, en plus de s’inscrire dans le dialogue avec la collectivité, ils gèrent complètement leur site, qui est clôturé et sécurisé.

Les enjeux

LM : Par sa reconquête d’une friche industrielle, cette opération a permis de recréer de l’emploi et de rapporter plus de fiscalité à la ville. Cependant, un tel parc logistique comporte aussi différents points négatifs, à commencer par la pollution engendrée par les nombreux camions fonctionnant majoritairement aux énergies fossiles et dégageant dans la ville des particules fines. Il est d’ailleurs à noter que notre commune a connu cet hiver un épisode de neige industrielle, un phénomène qui survient lorsque ces particules fines rencontrent de l’humidité et du froid. Sur le plan social, les rémunérations liées à l’activité logistique font par ailleurs que celles-ci attirent généralement des travailleurs pauvres, ce qui occasionne chez nous des enjeux de mixité sociale, un déséquilibre sociologique, ainsi que des dépenses publiques supplémentaires. Pour toutes ces raisons, nous avons été très heureux que Prologis reprenne cette friche, mais nous souhaitons que le développement logistique s’arrête à Moissy-Cramayel.

SL : On accueille trop rarement les logisticiens de façon positive. La logistique est généralement associée aux camions, donc à la pollution et à la congestion des axes routiers, ainsi qu’à l’artificialisation des sols. Pour autant, tout le monde sait que la logistique est nécessaire, puisqu’il faut bien alimenter les commerces de centre-ville, mais personne ne veut de livraison près de chez soi. Ce que fait Prologis en matière de biodiversité participe à notre acceptation par les riverains. C’est sur la partie transport que la Samada et le groupe Monoprix ont un rôle à jouer, en favorisant les motorisations bas carbone. Notre premier porteur électrique de 26 t est d’ailleurs entré en service le 1er avril. La somme de telles actions, conjuguée à la création d’emplois, fera que nous serons mieux acceptés par nos voisins.

CT : Prologis est confronté à des questions sur l’acceptabilité de ses projets partout en Europe et même aux États-Unis. L’enjeu est aussi pour nous de changer les idées reçues. Bien entendu, un énorme travail est engagé pour améliorer les solutions de transport de marchandises, et ceci prendra du temps, mais le bâti doit se défaire de son image d’immeuble peu qualitatif dans lequel les conditions de travail ne sont pas excellentes. Nous devons présenter ce qu’est un entrepôt dernière génération. Certains croient que l’entrepôt du futur intégrera avant tout la robotique et des procédés futuristes. Mais en fait, l’entrepôt du futur existe déjà : il intègre le bien-être des collaborateurs, un environnement de travail soigné et sécuritaire, ainsi que des vertus environnementales. Nous sommes très fiers d’avoir construit cet entrepôt, mais plus encore, nous avons l’espoir de ne pas être les seuls. Il faut qu’à partir d’aujourd’hui, tous les entrepôts soient construits selon ces standards : des immeubles peu émetteurs, peu consommateurs et permettant à ses occupants de travailler dans de bonnes conditions.

La municipalité ne semble plus souhaiter d’activités logistiques additionnelles sur son territoire, pour le moment, mais au regard des enjeux et de la demande croissante, la discussion devra probablement se poursuivre…

Line Magne

Line Magne (PS) a été élue maire de Moissy-Cramayel en mars 2014, devenant la première femme à accéder à cette fonction dans l’histoire de la ville de Seine-et-Marne. Directrice générale du Syndicat d’agglomération nouvelle (SAN) de Sénart pendant plus de 20 ans, elle avait amorcé son parcours professionnel au sein de Melun Sénart animation, association satellite de l’Établissement public d’aménagement en charge de l’accueil des nouveaux habitants sénartais. Ayant rejoint le Parti socialiste en 1981, elle a notamment occupé durant son parcours public le poste de première adjointe en charge de l’Éducation et de la Sécurité. 

Cécile Tricault

Cécile Tricault a rejoint Prologis en 2015 en tant que Senior Vice President, Country Manager pour la France, avant de devenir également Regional Head of Southern Europe. Elle a auparavant œuvré à titre d’Executive Director et responsable de l’asset management pour la France et le Benelux chez JP Morgan Asset Management – Real Assets, après avoir occupé les postes de Senior Asset Manager et de Fund Manager chez AXA Real Estate. Ingénieure diplômée de l’École centrale Paris (aujourd’hui CentraleSupélec), elle a commencé sa carrière en tant que responsable développement chez Bouygues Construction.

Sébastien Laizet

Sébastien Laizet a rejoint la Samada en mars 2009 en tant que responsable d’activité sur l’entrepôt Mode Beauté. Il a par la suite occupé différentes fonctions entre 2009 et 2019 : directeur de site, directeur e-commerce, directeur des opérations. En avril 2019, il devient directeur général de la Samada
puis directeur de la logistique Franprix depuis décembre 2021. Ingénieur de formation, il possède un diplôme en management de la chaîne logistique et est également diplômé de l’université de Technologie de Troyes.

Nommé aux Mipim Awards 2022 dans la catégorie « Meilleur complexe industriel et logistique », le Prologis Park Moissy 2 DC1, à Moissy-Cramayel, est la première plate-forme logistique carbone neutre au monde (80% de réduction et 20% compensés par des actions de reforestation), tant sur ses phases de construction et d’exploitation sur 50 ans. Ainsi, une réduction de 75% des déchets de chantier et l’utilisation de 20% de matériaux recyclés ont été privilégiées, de même qu’une structure alliant le bois et le béton bas carbone. L’installation de panneaux photovoltaïques sur 36 000 m2 de toiture permet la production de 1,4 GWh d’électricité, autoconsommée sur site. Par ailleurs, la solution géothermique de la greentech Accenta contribue à hauteur de 30     % à la décarbonation totale du projet en réduisant de 71     % les émissions. Situé au sein du Prologis Park Moissy 2 Les Chevrons, le bâtiment de 100 000 m2 est exploité depuis l’automne dernier par Monoprix, via sa filiale logistique Samada, pour une durée minimale de 12 ans. Il dispose des certifications Breeam Outstanding et Well Silver.


Article issu du numéro 185 de Business Immo Global.

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