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Carte blanche à… Fresh Architectures

Photo à la Une : © Fresh Architectures

L’agence Fresh Architectures aborde les projets, quelle que soit leur échelle, en interrogeant leur programmation et leurs usages. Au hasard des commandes et des concours, elle est passée maître (entre autres) de la réhabilitation lourde. Focus.

À l’origine de Fresh Architectures, il y a une rencontre entre trois jeunes architectes – Julien Rousseau, Ulisse Gnesda et Luca Battaglia – qui intègrent au même moment l’antenne parisienne de l’agence Renzo Piano Building Workshop (RPBW). Là, ils se forment à l’« école » Piano. « Une manière de dessiner, de concevoir, d’assembler, de prendre du temps, explique Julien Rousseau, associé fondateur de l’agence Fresh. Une manière aussi de trouver un équilibre entre le maître d’ouvrage et l’architecte, parce que le temps du projet est long et que la recherche y est fondamentale. » Pour l’architecte, ce passage au sein de l’agence internationale équivaut à un master. Et pour cause : il travaille sur The Shard, à Londres, une tour livrée en 2017 dont le projet avait démarré en 1997. Un temps long et un enjeu : « Améliorer, réinterroger, compléter. Ce processus spécifique de l’agence de Piano fait que le projet se bonifie au fur et à mesure du temps qui passe », souligne l’architecte.

Un socle commun

Forts de cette expérience qui leur a permis de créer un socle commun dans la manière d’approcher les projets, les trois architectes s’associent en 2007 pour créer Fresh Architectures. « Un pari sur l’avenir et un désir partagé : se faire connaître sous une marque commune », continue Julien Rousseau. Leur méthodologie et philosophie de travail consistent à aborder un projet sous toutes ses échelles, du design à l’urbanisme. « De l’agence RPBW, nous avons gardé le goût pour ce collage d’échelles à travers le dessin et l’atelier maquette que nous avons intégré dès le départ à l’agence. Nous aimons nous détacher des écrans, proposer des conversations autour de la matière, du réel d’un dessin. » L’agence travaille également sur l’échelle humaine qui questionne la programmation et les usages. « Nous nous posons des questions de cheminements, d’expérience. Tout cela vient avec un dessin qui permet de transformer les usages en espaces », développe Julien Rousseau.

Aujourd’hui, Fresh Architectures compte une soixantaine de collaborateurs, une taille d’agence qui permettrait d’intégrer un bureau d’ingénierie, à l’instar d’AIA ou d’Arep qui, eux, ont fait un pas de côté vers l’architecture. C’est le prochain défi de l’agence. Et des défis, elle en a relevés, notamment celui de la réhabilitation lourde.

Réhabilitation

Fresh Architectures a été chargée par Chestfield il y a environ huit ans de la réhabilitation de deux bâtiments situés aux 50 et 54 avenue Montaigne, dans le 8e arrondissement de Paris. La complexité pour les architectes a été de valoriser ces deux actifs en les sublimant, comme par exemple au 54 Montaigne, avec cette façade traitée telle un objet précieux grâce à une multitude de picots en porcelaine blanche qui la recouvrent. En repensant leur programmation aussi de manière à ce qu’ils correspondent aux besoins d’aujourd’hui. Transformer ainsi des niveaux de parkings inutilisés en espaces supplémentaires de commerce. Ou encore, redonner une cohérence au bâti existant et concevoir une nouvelle façon d’investir l’espace de travail, autour de la question du confort de l’usager. « Réhabiliter des bâtiments anciens permet de faire appel à des métiers d’art, d’éviter de consommer du territoire, retrouver de la valeur, mais aussi de la beauté », assure Julien Rousseau.

C’est aussi être capable de transformer des immeubles à travers leur programmation, comme faire des logements avec des bureaux. Fresh Architectures conduit actuellement une telle opération à Boulogne-Billancourt, menée par Ogic et BNP Paribas Cardif, au 50 rue Marcel-Dassault. Initié avant le Covid, ce projet propose de répondre à la problématique du déficit de logements en transformant des espaces existants qui n’ont pas été pensés pour y vivre, tout en apportant des réponses aux souhaits des occupants d’un logement neuf. Une attention majeure a ainsi été apportée à la modularité des espaces à vivre et à l’ouverture sur l’extérieur au moyen de coursives et de loggias, et d’espaces végétalisés généreux, au confort d’été… Étape très importante pour l’agence, ce projet lui permet de démontrer qu’elle est capable de construire la ville sur la ville. « J’avais plaisir à me dire que l’on ne consommait pas de territoire, se souvient l’architecte. J’ai senti que l’agence passait dans le monde d’une réflexion sur ‘‘l’accastillage”, sur le fait de se brancher à l’existant. »

Le 6 Sèvres

Dernière opération phare livrée de Fresh Architectures : le 6 rue de Sèvres, à Paris 6e – un flagship store de 1 275 m2 (maîtrise d’ouvrage : Thor Equities et Henderson Park) – qui abritait depuis 1902 une succursale de la Société générale. Affichant une façade monumentale, le bâtiment se composait à l’origine d’une partie sur rue en pierre et brique flanquée à l’arrière d’une verrière en métal et verre détruite par la suite. « Nous nous sommes autorisés à la reconstruire en redessinant un objet magnifique qui amène de la lumière au fond de la parcelle », explique Julien Rousseau. Dénaturé au fil des années, l’existant a ainsi été rénové dans son écriture d’époque avec, à l’arrière-plan, une boîte de métal, de bois et de verre construite en filière sèche qui s’affirme dans son expression contemporaine. Sur chacune de ses opérations de réhabilitation, l’enjeu pour Fresh Architectures a été de révéler le bâtiment d’époque, curer les éléments superfétatoires venus trahir le dessin originel, rechercher les corps de métier maîtrisant les savoir-faire nécessaires pour remettre le bâtiment en état et y ajouter une pièce de puzzle permettant de transformer les usages afin de correspondre aux besoins d’aujourd’hui. « Dans nos projets, quand il s’agit de réhabilitation, il y a forcément une pièce d’architecture contemporaine qui vient se greffer, conclut Julien Rousseau. Faire ce collage où la partie contemporaine saura être suffisamment discrète pour ne pas voler la vedette au patrimoine et en même temps avoir son mot à dire. C’est ce juste équilibre que nous recherchons. »

Un maximum de luminosité a été apporté au cœur des espaces intérieurs grâce aux vides et aux trémies. Dans ce projet où la densité de la matière s’articule avec la transparence, la lumière tient une place centrale. - © Fresh Architectures
Le 6 Sèvres, nouvel ensemble de commerce et de bureaux, se déploie dans les murs d’une ancienne succursale de la Société Générale dont la façade a été édifiée en 1902 par l’architecte Georges Eugène Balleyguier. - © Christophe Caudroy

Article issu du Business Immo Global 198.

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